Situé au cœur de l’Afrique de l’Ouest, le Burkina Faso compte plus d’une soixantaine d’ethnies réparties en trois familles : la famille mandingue, la famille sahélienne et la famille voltaïque. Originaire de la famille mandingue, je suis de l’ethnie bissa de par mes deux parents qui sont originaires de la même région. On peut donc dire que je suis bissa de souche pure. Malgré cela, il y a plusieurs us et coutumes de mon ethnie que je ne connais malheureusement pas.
Il y a quelques jours je discutais avec mon père qui m’a fait la belle proposition de rédiger un article retraçant un pan de notre culture qui disparait petit à petit : le mariage. Comme dans toutes les cultures, le mariage en pays bissa respecte des codes et des règles. Avec le temps plusieurs de ces codes disparaissent.

Un long cheminement avant le mariage
Autrefois, les funérailles, jours de marché ou de réjouissances populaires étaient les jours de rencontres entre jeunes hommes et jeunes femmes. Ils se déplaçaient en groupe. Lorsqu’un groupe est intéressé par une jeune fille, l’un d’entre eux l’aborde pour lui faire part de leurs intentions. A l’issue de la discussion elle devra faire un choix parmi le groupe de jeunes. Le prétendant choisi lui pose une série de questions pour en savoir plus sur elle, c’est-à-dire ses origines, son village, son quartier.
Dans les jours qui suivent, avec l’accord de la jeune fille, le prétendant et quelques amis/famille peuvent aller faire connaissance avec sa famille. Après les salutations avec les parents, les présentations sont ainsi faites. Ensuite, ils ont pour habitude de demander à la jeune femme les points de vente de cola. La cola fait ici référence aux noix de kola ou cola vendues en Afrique et qui servent lors de cérémonies telles que les mariages, baptêmes et autres. Très présente dans nos sociétés, la cola est symbole d’alliance entre deux familles. Cependant, si la fille ne désire pas que l’aventure continue, elle leur répond qu’il n’y a pas de point de vente de cola dans la zone. Le message est ainsi clair, elle ne désire pas continuer l’aventure.
De la cola pour le scellement des amitiés
Lorsqu’elle désire continuer l’aventure, elle leur indique les points de vente de cola. Lors de la rencontre suivante avec ses parents, ceux-ci demanderont à la jeune fille s’ils peuvent recevoir la cola. Si elle donne son approbation, ils lui rappellent qu’il n’y a pas de retour en arrière car seul ce jeune homme sera considéré comme son époux aux yeux de la coutume. A partir de cette étape commence donc le cheminement qui peut durer entre un et quatre ans. La période des enquêtes commence.
Cette période a pour objectif de connaître la généalogie du jeune homme. Elle sert également à confirmer l’absence de tout interdit à cette union future. Lors de la saison des pluies, le jeune homme, ses frères et amis iront travailler dans le champ de leur future belle-mère de la semence jusqu’à la récolte.
Pendant le temps que dure leur cheminement, la jeune femme peut aller passer quelques jours dans sa future belle-famille afin de mieux se familiariser avec eux. Mais elle passera ses nuits en compagnie de ses futures belles sœurs et belle-mère.

Une fois que les deux jeunes gens se sentent prêts pour le mariage, ils organisent en complicité avec leurs amis ce qu’on appelle le kidnapping par consentement. Seule la mère de la jeune fille peut être dans la confidence. La jeune fille sort en catimini avec ses bagages et s’en va en compagnie de son fiancé. Après quelques jours (entre une semaine et un mois), un émissaire est envoyé pour informer la famille que ce sont eux qui sont à l’origine de la disparition de la jeune fille.
L’étape suivante est donc l’envoi de deux représentants de la famille. Ils apportent des présents (cola, argent, mouton, sel ou autres). Cette rencontre se fait tôt le matin. Ils viennent avant le réveil des habitants de la concession et attendent jusqu’à ce que le chef de famille les reçoivent. Ils n’entrent pas dans la cour familiale. Les pourparlers se font dehors et durent au maximum 40 minutes. A la fin de la discussion ils rentrent directement chez eux sans collation.

Après le mariage, l’annonce de la naissance du premier bébé
Après le premier accouchement de la nouvelle mariée, il y a également une manière spéciale de l’annoncer à sa famille. Un jeune messager est envoyé avec un coq si c’est un garçon, et avec une poule avec un cauris attaché à la patte si c’est une fille. Il arrivait, annonçait la naissance dans la famille en déposant le coq (ou la poule) puis s’enfuyait précipitamment à dos de cheval ou à vélo.
En effet, il ne devait pas pas y rester longtemps au risque de se faire capturer, auquel cas la rançon serait un bouc ou un bélier. Ainsi se déroulait autrefois le typique mariage bissa. Avec le temps et les conditions qui ne s’y prêtent plus, on oublie peu à peu comment cela se faisait.
PS : Tous mes remerciements pour cet article reviennent à mon père qui s’est gentiment proposé pour m’expliquer de long en large les us et les coutumes de chez nous.
Commentaires